TROIS CONTRIBUTIONS D'INTELLECTUELS AFRICAINS
Il était une fois, Kadhafi (Par Souleymane Jules Diop)
Par Souleymane Jules Diop | Seneweb.
Les images que j’ai vues sont insoutenables, et les mots pour dire ma peine me manquent.
J’ai visité la Libye pendant un mois il y a plus d’une décennie et rencontré son Guide à plusieurs occasions. Je me souviens d’une jeunesse éduquée et dynamique, d’un peuple composé presqu’à part égale de noirs, d’arabo-berbères et de métis qui vivaient dans une parfaite harmonie. Le racisme n’y avait pas cours et les principaux collaborateurs du Guide libyen étaient des noirs.
Aux antipodes du patriarcat qui a encore cours dans de nombreux pays arabes, les femmes avaient dans celui-ci les mêmes droits que les hommes, assumant les plus hautes charges dans l’armée comme dans le pouvoir. Leur chef suprême, il est vrai, a imposé pendant plus de quatre décennies son socialisme à l’africaine condensé dans un livre vert vénéré comme une Bible. On ne pouvait pas visiter la Libye sans se sentir dans un Etat policier.
Mais les libyens s’en réjouissaient tant qu’il pourvoyait à leurs besoins et assurait leurs dépendances. En moins d’un demi-siècle, ce vaste territoire désertique a été transformé en un pays moderne avec une belle capitale que me rappelait Franckfort. Ses étendues de dunes ont été tapissées de cours d’eau, de lacs et de fleuves artificiels pour en faire une des plus grandes réussites agricoles au monde, exportant ses excédents vers l’Europe. Des travailleurs venus de toute l’Afrique y gagnaient leur vie sans discrimination. Ils étaient parfois soumis aux accès de colère de leur bienfaiteur, mais ce n’était jamais pour longtemps. Il était souvent bien loin au cœur du désert, se contentant d’une natte sous une tente, se nourrissant de dattes et de lait frais, obligé tout le temps de changer de gîte, sous la menace des attentats.
Quoi que nous puissions penser de lui, le Guide libyen a aidé de nombreux pays africains
et des mouvements nationalistes à se libérer du joug colonial ou de la dictature. Il était
profondément révolutionnaire et quand personne ne voulait voir Mandela, entendre parler
de l’Anc, il l’a soutenu, entraîné ses hommes pour libérer l’Afrique du Sud, comme il a
soutenu de nombreux opposants africains à leurs débuts. Il a formé à Benghazi le premier
groupe de calots bleus qui composent encore la garde rapprochée de l’opposant
Abdoulaye Wade.
Son côté mégalomane dominait certainement, mais il était ostensiblement panafricaniste,
partageant les fruits du pétrole libyen avec de nombreux peuples africains, changeant la
face de nombreuses capitales africaines par le financement d’infrastructures majeures ;
nommant la salle où nous avons tenu la première rencontre qui devait lancer l’Union
africaine « Ouagadougou
Je l’entends encore se déclarer africain, dire son amour pour l’homme noir,sa fierté d’être
africain, pressant les chefs d’Etat à signer l’acte de naissance de l’Union africaine. Le
panafricanisme a perdu un militant, certes controversé , mais un militant quand même.
Depuis le déclenchement de la rébellion, je n’ai pas vu les cachots avec des opposants
apeurés aux côtes charnues, je n’ai pas vu les tonnes de viagra qui avaient semble-t-il été
commandées pour perpétrer des viols collectifs. Je n’ai vu nulle part, dans les villes
conquises, des femmes ou des enfants se plaindre d’exactions de la part des hommes de Kadhafi.
J’ai vu quelques accusations qui n’ont pas été étayées. Mais de la part du Cnt, cette
organisation composite formée dans le bureau de Nicolas Sarkozy, j’ai entendu et vu les
preuves de tortures contre les hommes de ma race, accusés sans preuve de soutenir
Kadhafi, emprisonnés pour le seul motif qu’ils sont noirs de peau.
Kadhafi n’était donc pas le dictateur abominable que l’on nous présentait. S’il l’a été, ceux
qui prétendent libérer la Libye de son joug le sont autant que lui, puisqu’ils se réjouissent
de la fin d’un homme mort torturé. Ils ont entamé leur marche sur Tripoli par l’assassinat
de leur général. Ils la terminent par l’exécution sauvage de l’homme qu’ils vénéraient
comme un Dieu, contre lequel ils ne se seraient jamais dressés s’ils n’avaient pas la
promesse que
leurs actes passés resteraient impunis. Les images de la mort de Kadhafi sont
insoutenables de cruauté. L’affaire n’est pas encore évoquée, mais ils ont fait disparaître
des milliers de missiles sol-air, trafiqués dans la sous-région par toute sorte
de marchands d’armes et d’intermédiaires véreux. Ils ont pris, ces mercenaires du Cnt, un
homme digne, qui avait la foi en son pays et était en droit de défendre son régime contre
une invasion étrangère. Il avait le droit d’être jugé, pas d’être tué.
SJD
Calixthe Beyala après la mort de Kadhafi : « L’Afrique pleure, Sarkozy rit »
Kadhafi est mort ? Peut-être. L’Afrique est morte ? La Grande Afrique, une et indivisible ? Sûrement ! Elle s'en est allée en ce triste jour du 21 octobre 2011, avec le seul qui la portait
sur son coeur, dans ses tripes !
Elle s'en est allée avec celui-là, digne fils de son peuple qui suppliait les chefs d'Etats larbins de construire une grande armée africaine, une grande industrie africaine, de s'unir pour être
plus forts devant les autres grands groupes du monde. Et je pense que jamais, la tristesse ne m'avait autant habitée.
Pour moi qui l'ai connu, qui l'ai soutenu dans différents sommets où il essayait de raisonner ses pairs sur la nécessité de bâtir cette Afrique pour le bienfait des générations futures. Je me
souviens des sourires hypocrites et goguenards de ces lâches, ces contremaîtres qui se disent Présidents tournant en rond, renvoyant en permanence à demain, l'urgence… Parce que leurs Maîtres
leur avaient demandé de ne pas accepter l'idée cette Afrique unie et lumineuse, riche et fière, cette Afrique tout en rêve splendide kadhafiste."
Kadhafi est mort, assassiné par Sarkozy-BHL et leur coalition de fascistes ! Oui, il est parti… L'Afrique est orpheline. L'Afrique a perdu son père. Et l'Afrique pleure cette mère Libye. Et
l'Afrique pleure… Et ses tonnes de larmes déversées formeront peut-être une rivière qui reviendra peut-être reverdir les tombes, les tombes encore, des milliers de morts, des martyrs, ceux-là qui
pensaient qu'il valait mieux mourir que vivre assujetti !
L'Afrique pleure ; Sarkozy lui a ôté l'essence de sa vie ! L'Afrique pleure les
meurtres perpétrés par Sarkozy ; Sarkozy dorlote la nouvelle-née de sa femme Carlita
… Sarkozy rit et se réjouit de la mort de l'Afrique… Sarkozy rit et se réjouit de la
naissance de sa fille…
Tandis que les larmes salées de l'Afrique tournoient autour des joues des femmes
africaines devenues folles de douleur ; et ce chagrin coincé entre les pupilles des
hommes honteux de n'avoir pas su protéger leurs terres, de n'avoir pas su se battre pour
leurs familles, apeurés sans doute que Sarkozy-BHL se fâchent et distribuent d'autres
bombes toutes aussi meurtrières..."
…
Apeurés pour rien, pour tout, ignorant qu'il conviendrait de ne pas avoir peur
de mourir car un homme indigne n'en est plus un, car un homme castré n'en
est plus un, car vaut mourir que de vivre dans l'indignité !
Et Kadhafi l'avait compris… Et Kadhafi l'avait senti, sans doute choisi par les
Dieux, cet homme exceptionnel, savait qu'il valait mieux vivre auprès des
Dieux dans la dignité que cette insupportable honte qui submerge l'Afrique
incapable…
Et Kadhafi l'avait compris, lui si fier qu'il nous couvrait de ce trop-plein de
fierté... Qu'allons donc devenir, sans sa subtilité politique, sans cette
vision grandiose qui s'en allait au-delà de lui ?
L'Afrique est morte avec Kadhafi ? Peut-être pas… Peut-être prendre un thé
et penser à quelque chose de beau, penser et se dire que tout n'est pas fini,
que peut-être demain en s e réveillant, le monde aurait changé parce que
l'homme africain aura changé
…
Penser au beau à venir même s'il ne s'agit que d'un rêve… penser que réunir
la diaspora Africain-française est déjà beaucoup, que cette petite touche
pourrait être un peu d'espoir dans ce monde où l'homme africain n'est pas,
où la femme noire n'est pas, où le racisme géopolitique sarkozyste décide
que finalement la vie d'un Africain ne compte pas. Ou si peu. Qu'il peut
décider de qui doit vivre.
Libye : Le sang du lion et le festin des rats
Par Bahar Kimyongür | Le Post | Samedi 22 octobre, 2011
source: Le Post
Syrte ou la Stalingrad du désert, aura résisté de tout son sang contre la
barbarie céleste de l’OTAN et ses mercenaires indigènes. Au milieu de ruines
fumantes de la ville martyre, un lion est mort. Un lion qui, de son vivant
comme dans sa trépas, aura rendu sa fierté à sa patrie, à son peuple, à son
continent et à tous les damnés de la terre.
Autour de son corps agonisant, tels des rats affamés, les barbares du CNT et
de l’OTAN se sont disputés des lambeaux de sa noble chair.
« C’est nous qui l’avons achevé » clament les rats du Shape et de l’Elysée.
« Non, c’est nous. » rétorquent les rats indigènes.
Le corps lacéré de Kadhafi, c’est la Libye lacérée, donnée en pâtures à
l’OTAN et au CNT.
La Libye de Kadhafi était un pays fier. Ses citoyens ne devaient pas
quémander l’aumône à la porte des seigneurs européens.
La Libye de Kadhafi était un pays prospère. Elle était l’Eldorado de toute
l’Afrique. Un pays de cocagne assurant le plein emploi.
La Libye de Kadhafi était un pays paritaire. Les femmes étudiaient et
réussissaient mieux que les hommes. Les femmes décidaient. Les femmes
dirigeaient. Les femmes combattaient.
La Libye de Kadhafi était un pays généreux. Ecoles gratuites munies
d’équipements les plus modernes. Hôpitaux gratuits ne manquant de
rien. Cette Libye a entre autres, financé RASCOM 1, un satellite de
télécommunications qui allait permettre à tous les Africains de téléphoner
quasi gratuitement, eux qui payaient les tarifs téléphoniques les plus chers
au monde. L’Europe avait été jusqu’à coloniser les réseaux de communication
africains, forçant le continent à verser 500 millions de dollars par an pour le
transit vocal des Africains sur ses satellites.
La Libye de Kadhafi était un pays solidaire. Dotée d’un ministère chargée de
soutenir la révolution mondiale, cette Libye a accueilli à bras ouverts tous
les résistants du monde, a financé d’innombrables mouvements de
libération :
Black Panthers, militants anti-Apartheid, résistants chiliens, salvadoriens,
basques, irlandais, palestiniens, angolais. Habités par leurs fantasmes
primaires, des journaleux européens ont rapporté que des snipers féminins
des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) avaient été enrôlés
par Kadhafi. Pure intox. En revanche, les guerriers du mouvement de
libération du Sahara occidental, le Front polisario, protégeaient bel et bien
Tripoli de la barbarie de l’OTAN/CNT.
La Libye de Kadhafi a fait l’expérience de la démocratie directe. Kadhafi
rassurant. La population était encouragée à débattre et à choisir sa destinée
à travers les Comités populaires. Pas besoin de parlement ni de parti
Hélas, la Libye de Kadhafi n’est pas parvenue à faire vivre une démocratie
durable. Les luttes personnelles ont pris le dessus sur les intérêts collectifs
. Comme bien des révolutions, la Libye de Kadhafi a connu sa
dégénérescence idéologique et son cortège de souffrances et d’injustices.
La Libye de Kadhafi n’est pas parvenue à instaurer la concorde entre clans et
tribus de la Tripolitaine et de la Cyrénaïque.
La Libye de Kadhafi a cru que seule la force viendrait à bout des djihadistes
endiablés d’Al Qaida, des opportunistes et des renégats pro-occidentaux.
La Libye de Kadhafi a tenté de briser son isolement international, pensant
que les rats de l’Elysée, du 10 Downing Street, du Palais Chigi ou de la
Maison Blanche viendraient manger dans sa main. Ces rats se sont en réalité
sournoisement glissés dans la manche de sa tunique. Ils ont saisi l’occasion
pour infiltrer son pays, le saboter, le ruiner et le pomper pour un siècle.
A présent, les rats d’Europe et les rats du CNT étanchent leur soif dans la
crinière du lion.
Mais le lion s’est dérobé à leurs griffes pour rejoindre Lumumba et Sankara,
les autres enfants martyres de l’Afrique héroïque.
Buvez, hordes de lâches, buvez ! Que son sang brûle vos entrailles comme le
Zaqqoum !
Pleurez patriotes libyens pleurez ! Que vos larmes engloutissent vos
bourreaux et leurs armées !
Tripoli de la barbarie de l’OTAN/CNT.
La Libye de Kadhafi a fait l’expérience de la démocratie directe. Kadhafi
n’avait qu’un rôle symbolique, celui du vieux sage à la fois redouté et
rassurant. La population était encouragée à débattre et à choisir sa destinée
à travers les Comités populaires. Pas besoin de parlement ni de partis.
Hélas, la Libye de Kadhafi n’est pas parvenue à faire vivre une démocratie
durable. Les luttes personnelles ont pris le dessus sur les intérêts collectifs
. Comme bien des révolutions, la Libye de Kadhafi a connu sa
dégénérescence idéologique et son cortège de souffrances et d’injustices.
La Libye de Kadhafi n’est pas parvenue à instaurer la concorde entre clans et
tribus de la Tripolitaine et de la Cyrénaïque.
La Libye de Kadhafi a cru que seule la force viendrait à bout des djihadistes
endiablés d’Al Qaida, des opportunistes et des renégats pro-occidentaux.
La Libye de Kadhafi a tenté de briser son isolement international, pensant
que les rats de l’Elysée, du 10 Downing Street, du Palais Chigi ou de la
Maison Blanche viendraient manger dans sa main. Ces rats se sont en réalité
sournoisement glissés dans la manche de sa tunique. Ils ont saisi l’occasion
pour infiltrer son pays, le saboter, le ruiner et le pomper pour un siècle.
A présent, les rats d’Europe et les rats du CNT étanchent leur soif dans la
crinière du lion.Mais le lion s’est dérobé à leurs griffes pour rejoindre
Lumumba et Sankara, les autres enfants martyres de l’Afrique héroïque.
Buvez, hordes de lâches, buvez ! Que son sang brûle vos entrailles comme le
Zaqqoum !
Pleurez patriotes libyens pleurez ! Que vos larmes engloutissent vos
bourreaux et leurs armées !